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Il suffit de se laisser aimer

30 avril 2021

« Il y a un moment pour tout et un temps pour chaque chose sous le ciel : (…) un temps pour pleurer et un temps pour rire, un temps pour se lamenter et un temps pour danser, (…) un temps pour embrasser et un temps pour éviter d’embrasser, (…) un temps pour aimer et un temps pour haïr ! » *

Je les ai rencontrés plein de projets dans la tête et le sourire aux lèvres, je les ai vus réussir ce qu’ils entreprenaient, mais quand ils ont parlé d’amour, j’ai ressenti malgré leurs sourires une gêne, une tristesse, une envie aussi d’aller plus loin, mais comment ?

Qu’est-ce qu’aimer ? Et qui peut répondre vraiment à cette question ? Ce que je sais intérieurement et que j’expérimente, c’est qu’à chaque fois que j’ai peur de quelque chose, l’amour semble s’en aller bien loin. La peur est l’ennemi n°1 de l’amour, le mental prend le dessus sur la confiance, le faire sur l’être. La tendresse est alors remise à plus tard. Et puis l’amour ne se décide pas, il se reçoit. Il ne se laisse pas enfermer, il est libre comme le vent, c’est un mouvement, une aspiration, un appel à vivre d’une force incroyable.

Peut-être alors la décision, s’il y en a une à prendre, c’est d’accepter d’entrer dans ce mouvement et de se laisser porter sans savoir où il nous emmène . La plus grande difficulté en amour, ce n’est pas l’acte d’aimer, c’est peut-être partager avec la personne aimée ses ressentis, ses émotions les plus profondes, ses peurs qui remontent quelque fois à l’enfance, cette part intime qu’on enferme tout au fond de nous de peur d’être démasqué. Aimer est pourtant à portée de cœur, c’est commencer par être un peu tendre et délicat avec soi-même, faire confiance à son âme, être en contact avec le souffle initial, s’aimer pour donner ensuite et accepter peut-être de ne pas savoir aimer.

Je voudrais citer Magda Hollander- Lafon qui parle d’amour alors qu’elle a subi la haine dans les camps à l’âge de 16 ans. Ces écrits sont bouleversants :

« Demain dépend de la manière dont nous vivons le présent. La manière dont je vis, dont je me questionne chaque jour, dont je creuse et essaie de comprendre, c’est çà qui construit demain. Et puis il y a le fait d’aimer, d’apprendre à aimer. On parle beaucoup de l’amour, on le met à toutes les sauces. Mais le mot aimer est très fort. On n’aime jamais pleinement. Nous aimons l’autre souvent pour nous-même, mais rarement pour lui-même. Car on n’aime jamais vraiment l’autre que quand on a appris à s’aimer soi-même. J’espère mourir en aimant, jusqu’à la fin de ma vie, en tout cas, j’apprendrai à aimer. »

Mon sentiment est que l’enfance marque énormément la vie sentimentale et amoureuse (pardon, c’est une évidence !). Puis-je dire que j’ai découvert la tendresse à plus de 30 ans et que j’ai accepté de devenir (un peu) bienveillant avec moi-même à plus de 50 ? L’apprentissage de l’amour est une méditation sur ce qu’il y a de meilleur en soi et de meilleur en l’autre. L’amour ne s’invente pas, il se reçoit, fruit de la rencontre des âmes, reflet de notre nature divine, il entraîne alors les corps dans la tendresse et la danse du plaisir.

Et si la peur est encore là, c’est sans doute que nous ne savons pas écouter notre âme : nous vivons dans le passé ou dans le futur, dans les rêveries ou les fantasmes mais peut-être bien loin de l’être que nous croyons aimer.

Comme il est difficile de parler d’amour ! J’y associerais volontiers le mot de bénédiction : j’ai envie de dire à l’être que j’aime « Je te bénis ! ». Car la bénédiction prend en compte tout l’être avec ses qualités et ce que je ressens être ses défauts. Je le bénis dans son environnement qui est béni par la même occasion. Je bénis ce qui est beau et ce qui me semble obscur, je donne entièrement ma confiance. « Je te bénis et je t’aime ».

Quand j’exerçais mon ministère de prêtre, j’ai été un peu surpris au début qu’on me demande de bénir des objets, des croix, mais aussi une maison, des poissons rouges, une nouvelle voiture ! Au début je refusais ou faisais un pas de côté en trouvant une phrase qui bénissait l’être plutôt que la chose. Aujourd’hui, cela ne me choque plus, la bénédiction est amour donné, communion avec l’autre dans ce qu’il vit maintenant. Tout être et toute chose mérite d’être béni, sans oublier la nature car elle est témoin de nos amours et de nos peurs, elle porte le poids de nos corps et de nos vies, elle est sensible à l’attention qu’on lui porte.

Dans ma prière, je bénis celle et tous ceux que j’aime, je bénis leurs émotions et leur vie tout entière, je bénis celles et ceux qui les entourent, et je finis par bénir tous les êtres humains. Et là, je ressens que je reçois en retour plein de bénédictions. C’est le mouvement de l’amour et je suis heureux que ce mouvement transforme l’humanité et fasse grandir la joie intérieure. Il suffit de se laisser aimer.

* Livre de la Bible : Qohéleth, ch 3.

Et pour bénir celles et ceux qui s’aiment, je vous propose de murmurer ce poème issu de Psaumes insolites

Promesses d’amour - d’après le psaume 45 (44)

Une joie jaillit de mon cœur
Quand je pense à mon amour,
Je lui murmure des paroles douces,
Un poème à l’élu de mon cœur :
 
Ô fils d’homme, je suis émue par ta beauté,
La bénédiction de Dieu est descendue sur toi
Et ton visage en est rayonnant.
 
Fort comme un combattant,
Tu aimes l’action et les défis,
Tes armes sont la bonté et la justice,
Tu fais de nos différences une richesse.
 
Tu donnes ta confiance
Aux grands comme aux petits,
C’est pourquoi Dieu t’a choisi,
Il a posé sur toi sa main,
Tu es son ami, son témoin.
 
Il t’a béni en te donnant la joie,
Tu es venu vers moi et tu m’as regardée,
Dès le premier jour je t’ai aimé,
Aujourd’hui, j’accueille ton amour.
 
Et toi, tendre et belle,
Tu m’as séduit par ta beauté,
Tu poses un doux regard sur le monde,
Tout en toi invite au respect.
 
J’aime t’écouter et goûter ta présence,
Tu m’apprends la douceur du moment,
Je découvre la beauté de ton âme,
Avec toi je m’élève comme jamais !
 
Quand nous sommes loin
Ne doute pas de mon amour,
Avec moi regarde l’immensité du ciel,
Tu verras que nos yeux s’y retrouvent !
 
Tous deux, bénissez votre Dieu,
Car votre amour vient de lui,
Que la joie envahisse vos cœurs.
 
A la place de vos parents,
Filles et fils se lèveront,
Pour des générations, on se souviendra de votre amour.
 
Tous vos amis vous accompagnent
Et tous les âges se réjouissent
De la beauté qui émane de vos cœurs.
 
En vous tendresse et vérité se rencontrent,
Justice et paix s’embrassent,
Soyez bénis car ce jour est éternel.