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Quelque part entre chaos et harmonie

25 avril 2023

Nous croisons en une seule journée tous les mondes : l’observation d’une simple fleur de printemps ou d’un ciel scintillant de mille étoiles, l’écoute de nouvelles effroyables à quelques dizaines ou milliers de kilomètres de chez nous, un concerto de Telemann, la violence du monde et un sourire d’enfant, le bienfait d’un geste de tendresse et la peur de la mort... Tout vient se rencontrer en nous mais notre regard se pose seulement sur ce que nous sommes capables d’accueillir et prêts à intégrer.

«  Un temps pour donner la vie, et un temps pour mourir  ;
un temps pour planter, et un temps pour arracher.
Un temps pour tuer, et un temps pour guérir  ;
un temps pour détruire et un temps pour construire.
Un temps pour pleurer, et un temps pour rire  ;
un temps pour gémir, et un temps pour danser.
Un temps pour jeter des pierres, et un temps pour les amasser  ;
un temps pour s’étreindre, et un temps pour s’abstenir.
Un temps pour chercher, et un temps pour perdre  ;
un temps pour garder, et un temps pour jeter.
Un temps pour déchirer, et un temps pour coudre  ;
un temps pour se taire, et un temps pour parler.
Un temps pour aimer, et un temps pour ne pas aimer  ;
un temps pour la guerre, et un temps pour la paix.  »

Livre de l’Ecclésiaste chapitre 3, 2-9

Nous vivons tous ces temps à l’intérieur de nous-mêmes, quelque fois dans une même journée, éveillant autant d’émotions et de pensées. Avec plus ou moins de talent, nous cherchons l’harmonie et essayons d’échapper à la souffrance.

L’artiste sait que sa création naît d’une forme de chaos duquel va jaillir les formes, les mots et les couleurs.

Le priant et l’orante expérimentent souvent le vide ou le doute avant de se rendre présents à Dieu ou au monde.

Les scientifiques se perdent volontiers dans des raisonnements et des données qui leur semblent parfois absurdes avant d’avancer vers la connaissance de ce qui est. Ils se réjouissent alors de partager ce qu’ils ont découvert par une publication ou un échange entre pairs.

Chaos et harmonie sont constitutifs de notre humanité et nous semblent opposés comme une équation insoluble. La mauvaise idée est sans doute de vouloir séparer les choses comme on sépare le bon du mauvais ou le bon grain de l’ivraie au risque de tout perdre  !

Dans les textes les plus anciens de l’humanité, toute création prend naissance dans le chaos, pourquoi serait-ce autrement pour nous  ?

«  En-tête (au commencement) Elohims créait les ciels et la terre. La terre était tohu-bohu, une ténèbre sur les faces de l’abîme, mais le souffle d’Elohims planait sur la surface des eaux. Elohims dit : une lumière sera. Et c’est une lumière  »

Livre de la Genèse chapitre 1, verset 1- traduction d’André Chouraqui

Ce que nous voyons ou jugeons de l’humanité existe aussi en nous-mêmes, le meilleur et le pire se côtoient, le combat et la paix, la peur et la tristesse, la vie et la mort. C’est ce qui fait notre unité et notre incarnation. En nous acceptant avec tout cela, nous trouvons la joie.

Il est bon quand le temps est venu de se confronter aux chaos et ombres de nos vies et de les regarder dans leurs réalités sans fuir. Ce sont souvent des passages douloureux mais qui permettent de nous transformer et laisser grandir en nous l’homme nouveau ou la femme nouvelle.

Les passages et les deuils sont des temps de souffrances qui ouvrent à une vie nouvelle, une résurrection. Je sais que la tristesse aussi ouvre le cœur. C’est en ce sens que je crois en Jésus vivant, lumière divine et permanente pour le monde. Il a connu l’humiliation et le rejet des hommes, s’est même senti abandonné de Dieu, jusqu’au chaos et à la mort pour inaugurer alors une humanité nouvelle, réconciliée avec la création, unifiée dans sa diversité. Cela nous donne une responsabilité énorme de croire et de porter cette espérance.

C’est avec une nouvelle oreille que j’entends alors cette phrase de Jésus dans l’Evangile de Matthieu : «  Que l’homme ne sépare pas ce que Dieu a uni  !   » Au-delà de la fidélité du couple, il s’agit d’abord de la fidélité à soi-même : accepter d’être fait de chaos et de vie. C’est alors notre mission de ne cesser d’unifier en nous corps, souffle et esprit, sentiments, croyances et pensées et trouver l’harmonie. La relation à l’autre est alors mise en valeur pour honorer chez elle ou chez lui ce qui est de l’ordre du beau, du bon et du divin.

Il nous faut inventer une nouvelle relation au monde et à l’univers, qui, au-delà du chaos, nous permette de rendre au centuple la vie qui nous a été donnée et de créer.

Il y aura alors un temps de gratitude.

Doutes - d’après le psaume 14 - Psaumes insolites

Dans mes jours de folie je déclare :
On peut vivre sans Dieu,
Le monde à la dérive en est la preuve,
Il a même oublié son origine  !
 
Le doute s’empare de mon cœur
Quand le jugement l’emporte sur la foi
Et la puissance sur l’œuvre créatrice :
Ils épuisent les biens de la terre
Au lieu de la remercier de ses dons infinis.
 
Ils se parlent, mais ne s’écoutent pas,
Ils agissent mais ne réfléchissent pas,
Ils sont aimables avec ceux qui leur sont utiles,
Mais s’en débarrassent lorsqu’ils leur ont tout pris  !
 
Jamais ils n’invoquent le Seigneur,
Mais voilà qu’ils se mettent à trembler
Lorsqu’arrive le malheur :
“ Y a-t-il un Dieu  ? ”
 
Dieu pourtant regarde avec espoir
Celles et ceux qu’il a créés par amour,
Il connait nos âmes et danse avec elles
Pour nous emporter vers ce qu’il y a de meilleur.
 
Le Dieu que je prie est tendre et juste,
Il continue à parler avec mes lèvres,
Il se sert de mon cœur pour aimer et pardonner,
Il m’apprend à regarder le monde avec amour.