Un désir de paix
17 novembre 2024
J’ai le cœur lourd, lourd de la guerre, lourd de la violence et des injonctions des hommes à imposer leurs vérités, lourd de la souffrance de celles et ceux qui n’ont pas décidé et qui n’ont pas le choix.
De mon côté, je ne sais pas contrer, invectiver et n’ai pas toujours le courage de dire par peur d’entrer dans un conflit dont je ne veux pas. Je me sens pourtant bien à ma place quand j’offre tout cela et m’ouvre à l’univers et à Dieu. C’est la simple expérience de mon humanité qui ne peut être autrement qu’en relation avec celles et ceux qui partagent la même terre que moi.
Me désoler serait donner crédit à ceux dont les propos attisent et fabriquent la haine, la violence et le chaos du monde. Mon arme est alors celle de la prière, une arme pointue qui atteint le cœur et fait chanter l’âme, une arme puissante contre toute forme de division, l’arme de la paix intérieure qu’aucun évènement extérieur ne peut anéantir. Ma prière me transforme et touche le monde, elle s’unit à tous les priants du monde, sans distinction d’appartenance ou de religion.
Le temps des croisades est terminé depuis longtemps, ceux qui veulent y retourner appartiennent au monde ancien et à la mort. Les soi-disant combats contre le mal sont perdus d’avance.
A chaque fois que je prie, je choisis la vie et agis pour le juste et le bon en moi et autour de moi. J’apprends à transformer tout combat en danse comme l’a fait Jacob avec l’ange (Genèse ch.25) : au cours d’un déplacement nomade, laissant ses proches et sa famille passer sur l’autre rive, il est resté de ce côté pour réfléchir, seul avec ses pensées et ses contradictions. Le livre de la Genèse dit qu’il s’est battu avec un envoyé de Dieu toute la nuit. Au petit matin, blessé à la hanche, Jacob a le cœur purifié et une foi à déplacer les montagnes. Je comprends qu’il a vécu une lutte intérieure entre son ego et les intuitions de son cœur. Il sent que la colère et de la révolte sont stériles et appartiennent au passé. Vient alors pour lui le temps de l’acceptation de ce qui est : l’ego et les multiples pensées laissent enfin parler l’âme, et sa mission qui y est inscrite dès l’origine. Il passe à son tour sur l’autre rive, rejoint les siens. Sa vie et son rapport aux autres changent, il devient juste dans tout ce qu’il entreprend.
La transformation personnelle consiste à être davantage présent à la vie et transformer les batailles contre son corps et ses pensées vagabondes en danse, puis faire confiance, accepter la dualité de son être et désirer l’unité plus que tout. C’est la seule manière de faire grandir la paix.
Etty Hillesum a écrit un journal intime entre 1941 et 1943 dans lequel elle montre une foi indéfectible en l’homme alors qu’il accomplit ses plus noirs méfaits. Elle mourra à Auschwitz en novembre 1943, elle avait 29 ans. Elle disait : « Je ne vois pas d’autre issue : que chacun de nous fasse un retour sur lui-même et extirpe et anéantisse en lui tout ce qu’il croit devoir anéantir chez les autres. Et soyons bien convaincus que le moindre atome de haine que nous ajoutons à ce monde nous le rend plus inhospitalier qu’il ne l’est déjà. » (Une vie bouleversée - Journal 1941-1943, Ed. Seuil p. 218).
Combat intérieur - Psaumes insolites - d’après le psaume 52
Ô mon Dieu, comprends-moi, éclaire-moi,Il y a tant d’adversités en moi-même,Le feu et la source, le jugement et la prière,La peur et la confiance, le fort et le faible !Je croyais qu’il me fallait être fort et combatif !Devant toi et devant mes frères,Il me fallait montrer, prouver, agirPour vivre selon tes préceptes.L’homme fort s’expose, le faible se cache,Mon âme gémit, mon cœur est déchiré ;Dans la prière je me présente à toi,Et c’est dans ma faiblesse que tu me rejoins.Toi l’homme fort !Tu es dans le mal et tu en es fier,Ne sais-tu pas que Dieu est amour ?Ta langue coupante prépare un jugement,Avec tes lèvres tu es prêt à blesser,Tu fais le contraire de ce que t’enseigne ton âme !Tu préfères le mal au bienEt le mensonge aux paroles bienveillantes,Dans ton geste de haine, tu caches une souffrance.Dieu veut retirer ton mensonge de la terre des vivants,Il veut arracher ton habit de violence,Il est là et attend ton accord.Mais moi, je n’ai plus peur,Je suis comme un bel olivierDans le jardin de mon Dieu,J’ai répondu à son appel.Dieu, sans fin je veux te rendre grâceCar j’ai vu ce que tu as changé en moi,J’espère en toi devant ceux qui disent ton nom,Je sais maintenant que tu es bon.